Yannick

Yannick, le dernier film de Quentin Dupieux, met en scène la prise d’otage d’une salle de théâtre parisienne par un spectateur, déçu de la qualité de la représentation. Ce dernier (Yannick) menace alors avec une arme à feu les comédiens, pour les faire jouer quelque chose de plus agréable à voir, pour lui et le reste du publique.

Comme souvent avec Dupieux, Yannick se veut provocateur, interrogeant notre manière de consommer l’art, en un huis-clos minimaliste d’à peine plus d’une heure. Yannick soulève notamment la question de la normalité de devoir subir passivement une œuvre plutôt que de la remettre en cause, à travers le personnage éponyme qui incarne cette rupture avec la soumission artistique en prenant l’initiative d’agir au lieu de subir. Une réflexion est également portée sur la capacité des acteurs et autres artistes à accepter la critique et leur volonté ou non à se conformer aux attentes du public. Le fait qu’ici les comédiens ne réagissent qu’en situation de contrainte ou de menace est mis en évidence par le choix de Yannick de se doter d’une arme pour faire entendre sa voix par la peur.

Yannick est un homme ordinaire vivant une existence peu passionnante, qui ne lui donne que rarement le temps ou les moyens d’assister à des pièces de théâtre. Qu’il soit perçu comme un protagoniste ou un antagoniste, c’est un personnage avec lequel nous pouvons aisément établir un lien, réalisant nos fantasmes de spectateurs en brisant la monotonie et en prenant des mesures drastiques pour changer le cours de l’histoire qui se déroule sous ses yeux.

Bien que Blanche Gardin, Pio Marmaï et Sébastien Chassagne soient extrêmement convaincants dans leur rôle de comédiens nullisimmes, c’est tout de même la performance de Raphaël Quenard dans son interprétation de Yannick qui porte le film sur ses épaules. Plus généralement, les rôles et réactions des personnages (notamment le public) paraissent incroyablement réels, donnant à l’ensemble de l’œuvre une certaine authenticité.

La brièveté du film et la redondance du décor passent inaperçu tant le contenu est riche et captivant, ne laissant à aucun moment la possibilité au spectateur de s’ennuyer. En plus d’être drôle, Yannick nous offre une réflexion sur notre relation avec l’art et la manière dont nous pouvons, à l’instar du personnage principal, choisir d’agir plutôt que de subir.